L'optimisme, ce n'est pas le refus de voir ce qui ne va pas, c'est le désir de ne pas s'y attarder. // Donne moi le courage de changer les choses que je peux changer, la sérénité d'accepter celles que je ne peux pas changer, et la sagesse de distinguer entre les deux. (Marc Aurèle) // Don't raise your voice; improve your argument. (Desmond Tutu) // Be the change you want to see in the world. (Gandhi)

29.11.20

Ses conseillers lui disaient qu’ils avaient entamé des recherches approfondies en Europe, afin d’y trouver quelqu’un qui aimait bien George Bush,  mais apparemment, c’était aussi difficile que de trouver des armes de destruction massive en Irak.

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George savait bien que l’intelligence et l’expérience ne servaient à rien si on voulait devenir président–c’est Karl Rove qui le lui avait appris. 

Si on voulait devenir président, il fallait de la ténacité, de l’entregent, de la simplicité dans ses manières pour faire plaisir aux électeurs. 

Il fallait aussi pouvoir ramasser des sommes énormes, des millions, pour convaincre la populace qu’on était un type bien et que son adversaire, peu importe qu’il soit Hercule ou Rambo, était médiocre et versatile.

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Cependant, un ennemi, ou même une multitude d’ennemis, doit avoir un visage, un nom ; Karl et Dick et Don avaient eu ensemble un autre coup de génie : la Guerre éternelle serait contre le Mal et le terrorisme.

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Mais oui, on peut tout faire avaler, s’écria Karl en recommençant à faire tournoyer ses bras comme un hélicoptère. 

Nous avons convaincu deux Américains sur trois que c’étaient les Irakiens qui avaient attaqué le World Trade Center !

Nous avons fait croire à la moitié d’entre eux que Saddam Hussein était copain avec les membres d’al-Qaida et qu’ils essayaient ensemble de développer une bombe atomique fourrée à l’arsenic !

Nous avons réussi à les convaincre que l’Arabie saoudite et l’Égypte étaient nos alliées, alors même que presque tous les terroristes du 11 septembre 2001 étaient saoudiens ou égyptiens. 

Je vous le dis, on peut tout faire avaler aux Américains, tout !

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Parler ou ne pas parler, telle était la question. Était-il plus noble de passer à la postérité comme l’homme qui avait changé d’avis sur absolument tout, ou comme le zinzin qui était persuadé qu’il était possédé par le Fils de Dieu ?

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Dieu avait créé la terre et le ciel, mais Otto, Fox et quelques autres mastodontes des médias, sans compter les milliers d’agences de publicité, créaient chaque jour ce qui était, du point de vue de la population générale, la « réalité de la terre et du ciel

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Tu crois que notre occupation en Irak a donné l’image d’un pays superpuissant, Dick ? demanda le président. 

Nous avons clamé haut et fort que les insurgés étaient peu nombreux, dix ou quinze mille tout au plus, et nous n’avons même pas pu les battre : tu crois qu’on a donné l’impression d’être une superpuissance ?

En Afghanistan, les talibans sont de plus en plus nombreux et de mieux en mieux armés, et pourtant ça fait cinq ans qu’on les a défaits : tu te crois superpuissant ?

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Les relevés de cartes de crédit seraient particulièrement utiles pour déterminer si chacun dépensait vraiment autant que possible pour les cadeaux de Noël. 

Le ministre, comme le Père Noël, voulait savoir qui avait été gentil, et qui avait été vilain.

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Depuis plus d’une cinquantaine d’années, il était de plus en plus évident que Jésus était né, avait souffert pour nos péchés, était mort puis avait ressuscité pour que les ventes au détail augmentent au quatrième trimestre.

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Jésus : J’ai fait de mon mieux. Je croyais même arriver à quelque chose. Dieu : Ça ne marche jamais. Je commence à Me dire que J'ai dû arranger les choses pour que ça finisse toujours comme ça.



(Jésus-Christ Président de Luke Rhinehart)


 On m’a assuré que vous étiez bon enquêteur, je suis plutôt déçu.
–On m’a assuré que vous étiez carrément désagréable. Personnellement, je suis comblé.
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C’est le drame de nos vies, ironisa Johanna. On consacre nos journées et nos nuits à aider de parfaits étrangers sans être capables de faire attention à ceux qui nous sont proches.
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Il y a quarante-trois mille habitants pour un taux record d'abstention de 72% et on aurait plutôt intérêt à ce que ça ne change pas.
Moins on a de votants et plus il est simple d'influer sur le cours d'une élection, c'est mathématique. Mathématique, pas politique.

(Territoires d'Olivier Norek)

23.11.20

L’enfer reste toujours le regard que les autres portent sur nous. Comme un jugement. Le regard qui nous examine, celui qui nous empêche d’oser, celui qui nous freine, celui qui nous peine, celui qui nous fait nous aimer ou nous détester.

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Les pieds dans le plat et sans délicatesse aucune, le moniteur n’imagina pas une seconde le bien qu’il avait fait à Noémie. 
Il lui avait parlé sans égard particulier ni condescendance, comme on s’adresse à n’importe qui. Elle était n’importe qui. Normale en somme.
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Répétez continuellement à un enfant qu’il ne fait que des bêtises et il les multipliera. 
Répétez-lui qu’il n’est qu’un idiot et il le deviendra. Tout simplement parce que nous n’aimons pas décevoir.
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–Qu’on soit clairs, vous et moi, brigadier. Que vous soyez un gros con ne me dérange pas outre mesure. 
Tant que vous êtes un bon flic. Vous avez déjà coché la case « gros con » avec brio. Félicitations. Je vous laisse l’avenir pour cocher la seconde.

(Surface d'Olivier Norek)

14.11.20

 Il dit que les types du zodiac ont mal fait leur calcul, qu’ils ont trop d’Afghans.
–Et c’est un souci ?
–Oui, visiblement. Ils essaient de mélanger les origines. S’il y a trop de voyageurs d’un même pays et que la traversée rencontre des problèmes, 
ils peuvent former des groupes, se rebeller et prendre le contrôle du bateau. Donc ils vont virer une vingtaine d’Afghans et ils cherchent des Soudanais ou des Syriens pour les remplacer.
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Cherchez pas, ça n’existe nulle part ailleurs et dans aucun texte de loi. C’est du fait maison Calais, spécialité locale. 
En gros, avec ce statut bâtard, on ne peut pas les interpeller. Logique, si on refuse de les intégrer à la France ce n’est pas pour les faire rentrer dans le système judiciaire.
Mais on ne leur donne pas non plus la qualité complète de réfugiés, sinon, il faudrait s’en occuper. Donc avec cette appellation de réfugiés potentiels, 
ni on ne les arrête, ni on ne les aide. On les laisse juste moisir tranquilles en espérant qu’ils partiront d’eux-mêmes.
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Ouais. Les migrants fuient un pays en guerre vers lequel on ne peut décemment pas les renvoyer, mais de l’autre côté, on les empêche d’aller là où ils veulent.
C’est une situation de blocage, on va dire.
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Alors tu es un des seuls à avoir une activité de jour. C’est bien, ça t’évitera de devenir fou. Il y en a beaucoup, ici, des fous. 
À cause de ce qu’ils ont vécu, de ce qu’ils ont vu, de ce qu’ils ont perdu. Leur seule activité, c’est la nuit, à chercher un camion pour le passage vers l’Angleterre. La journée, ils ruminent comme des vaches.
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D’accord, sauf qu’ils sont dix mille à toquer. Et avec le phénomène d’aspiration, si on ouvre pour ceux-là, dix mille autres se présenteront, puis dix mille autres
–Je sais, mathématiquement, ça tient, mais humainement, ça bloque toujours…
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À la fin, il faudra regarder tout ce qu’on a accepté de faire, murmura-t-il. Et ce jour-là, j’ai peur de me dégoûter.
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Vous préférez quoi, Miller ? Qu’un Syrien que personne ne connaît fasse partie des dommages collatéraux ou qu’une cinquantaine de bons Français crèvent dans l’explosion d’un aéroport ?
–C’est un choix impossible.
–C’est mon job, de faire des choix impossibles.
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Il était de retour, aujourd’hui, sur ces terres entre deux mondes où les dunes avaient retrouvé leur calme. 
Plus de migrants, plus d’humanitaires, comme si d’un coup de baguette magique, le problème avait été résolu. Probablement le plus bel enfumage de la décennie.

(Entre deux mondes, d'Olivier Norek)

10.11.20

Elle était si triste qu’on ne voyait même pas qu’elle était moche.
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Je n’ai jamais été dans une église parce que c’est contre la vraie religion et la dernière chose que je voulais c’était de me mêler de ça. 
Mais je sais que les chrétiens ont payé les yeux de la tête pour avoir un Christ et chez nous il est interdit de représenter la figure humaine pour ne pas offenser Dieu, 
ce qui se comprend très bien, car il n’y a pas de quoi se vanter. J’ai donc effacé le visage d’Arthur, j’ai simplement laissé une boule verte comme de peur et j’étais en règle avec ma religion.
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Il est finalement redescendu au deuxième étage et sa visite n’a rien arrangé du tout, Madame Rosa voyait que les gens devenaient de plus en plus gentils avec elle et ce n’est jamais bon signe.
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Maintenant, je vais tout à fait bien, dit Monsieur Yoûssef Kadir,
—et il nous regarda tous pour s’assurer que c’était vrai.
—Je vous encourage à continuer, dit Madame Rosa, car il n’y avait que ça à dire.
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—Ah bon. Tu es un garçon très intelligent, très sensible, trop sensible même. 
J’ai souvent dit à Madame Rosa que tu ne seras jamais comme tout le monde. 
Quelquefois, ça fait des grands poètes, des écrivains, et quelquefois… Il soupira.
—… et quelquefois, des révoltés. 
Mais rassure-toi, cela ne veut pas dire du tout que tu ne seras pas normal.
—J’espère bien que je ne serai jamais normal, docteur Katz, il n’y a que les salauds qui sont toujours normals.
—Normaux.—Je ferai tout pour ne pas être normal, docteur…

(La vie devant soi  de Gary, Romain/Ajar, Émile)

8.11.20

 
C’est une robe qui te déshabille si bien
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Je vais m’exercer seul à ma fantasque escrime, 
Flairant dans tous les coins les hasards de la rime, 
Trébuchant sur les mots comme sur les pavés, 
Heurtant parfois des vers depuis longtemps rêvés.
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Il marche toujours à côté du bonheur en se créant tant de besoins.
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—Je viens voir Coco Mal-Perché ! 
La fille pousse une porte et annonce :
—Monsieur Poulet-Malassis, votre rendez-vous est arrivé.
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Parfois je n’arrive plus à me suivre. Je devrais me mettre une laisse !
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Le curé, pendant confesse, m’a demandé si tu avais des nouvelles de Dieu te concernant et si, t’égarant peut-être dans une autre église, tu l’avais vu récemment ?
—On se salue quand on se croise, répond Baudelaire, mais comme deux qui ne sauraient éteindre tout à fait le souvenir d’anciennes rancunes…
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Il y a des moments où je doute de votre état mental, mon cher Baudelaire. Il y en a où je n’en doute plus ; c’est la plupart du temps.
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Poulet-Malassis fait les présentations :
—L’avocat que nous avons engagé : Gustave Gaspard Chaix d’Est-Ange !
—Chères fesses d’ange ? a compris Charles en s’étonnant de ce patronyme à rallonge.
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Les Bijoux… On retire Les Bijoux du livre et c’est Baudelaire qui s’en trouve castré.
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Aux yeux de plusieurs, Charles reste un étranger et l’étranger c’est l’ennemi.


(Crénom, Baudelaire ! de Jean Teulé)